vendredi 30 avril 2010

Médias : Peut-on faire confiance aux Canadiens de Montréal?

Une éclipse médiatique, c'est lorsque une nouvelle retient la majorité de l'attention des médias. L'élimination, au hockey, des Capitals de Washington par les Canadiens de Montréal mercredi 28 avril a occupé, selon Influence Communication, jusqu'à 82% de l'espace médiatique. Une aubaine pour certaines entreprises qui en profitent pour faire circuler une mauvaise nouvelle qui passera inaperçue ou presque dans les salles de rédaction, surtout lorsque d'autres éclipses sont à prévoir pour les prochains matchs qui opposeront le CH à leurs prochains adversaires. Peut-on alors parler d'exhaustivité en matière d'information?

Certaines nouvelles méritaient un peu plus de développement. Par exemple, lundi 26 avril, avant le match éliminatoire, le maire d'Outremont était arrêté dans le cadre de l'opération Marteau, qui vise à faire le ménage dans l'industrie de la construction. Fraude, abus de confiance et fabrication de faux documents sont ses chefs d'accusation. Pas de suite de l'affaire depuis lundi, excepté aujourd'hui vendredi, dans un article de La Presse qui ne fait plus référence au maire d'Outremont mais à une opération en cours de l'escouade Marteau dans la ville de Québec.

On a vu les maires de Montréal et Québec, le Mardi 27 avril, en visite à Chicago pour signer une résolution contre les armes à feu. La nouvelle n'a pas fait long feu et pour cause, ce sont deux villes où les taux de criminalité sont parmi les plus bas en Amérique du Nord....

On a pu échapper au lancement du deuxième album de Jonathan Roy (qui s'en plaindrait?), au succès de l'opération Montreal.net, un cheval de bataille qu'affectionne particulièrement Gerald Tremblay. Il y a eu également un peu de mouvement dans l'affaire qui opposent les journalistes du Journal de Montréal à leur patron Quebecor.

Mais cette éclipse est aussi génératrice d'informations, comme les débordements (prévisibles) dans le centre-ville de Montréal suite à la victoire des Canadiens, ou encore l'évacuation, le lendemain du match, de 200 personnes d'un immeuble suite à des odeurs incommodantes, probablement du gaz poivre lancé par les policiers la veille qui se serait répandu, sans parler des multiples et infinies débats sur les prédictions des prochains matchs à venir.

Ce bref aperçu montre que le public consommateur d'informations est encore sous l'emprise des grands médias que sont la presse, la télévision et la radio. Les sources d'information des réseaux sociaux, des blogues et autres fils d'actualités restent entre les mains des agences de presse, qui vendent l'information aux salles de rédaction qui décident de ce qui va être ou non traitable et diffusable. Autrement dit, l'espace médiatique est encore trop restreint, malgré la multiplication des canaux. Parce que cette infinité trouve finalement sa limite dans l'attention que l'on peut porter aux nouvelles. Trop de choix tue le choix et il est toujours plus agréable, lorsqu'on n'est pas expert, que l'on choisisse pour nous plutôt que de faire notre propre choix.
C'est le travail d'un rédacteur en chef, et même si on peut gérer ses propres fils de nouvelles, n'est pas rédacteur en chef qui veut. 

Le travail des journalistes est-il de faire tout voir et tout entendre? Il perdrait son lectorat si tel était le cas. La preuve en est la réduction en nombre de caractères des articles parues, sans parler des formats en ligne, et aussi de ce propre blogue, pour lequel j'essaie toujours de restreindre et de synthétiser le plus mes idées. Twitter en est l'extrême, 140 caractères pour délivrer une information, difficile de faire plus court. Les médias permettent une hyperspécialisation de l'information, ce dont la télévision par câble et ses chaînes thématiques étaient précurseurs, et c'est idéal lorsqu'on peut trouver une information précise et ses cohortes d'experts qui l'accompagnent.

Les médias ont le droit de prétendre à l'exhaustivité, mais ce n'est qu'un attribut qui leur est propre et c'était l'argument de vente principale des fournisseurs d'accès à Internet dans les années 1990. Ça ne dépend pas de ce qu'une équipe de communicateurs peut faire. Ce qu'ils font, c'est sélectionner, juger de la pertinence, traiter, diffuser. L'information pure n'existe pas, l'information est un événement qui a été traité.

Quand on regarde un film ou qu'on lit un roman on accepte facilement d'entrer dans l'histoire car nous savons que c'est une fiction. C'est la même chose, dans une moindre mesure, pour l'information, et ce n'est pas pour rien si les anglophones utilisent le terme "story" pour désigner une nouvelle. On doit malgré tout faire confiance aux médias, en gardant en tête que quoi qu'il arrive, sans être non plus constamment sceptique, que toute information est manipulée, et que le point de vue adoptée n'en est qu'un parmi d'autres. La multiplication des sources et des points de vue peuvent alors devenir une des garanties de la valeur d'information.

mardi 27 avril 2010

Publicité : Crise identitaire, les agences ont des boutons

Les nouvelles technologies ont remis en cause les modèles d'affaires des agences de publicité. Elles ont construit leurs structures en fonction de médias établis depuis plusieurs décennies ou même plusieurs siècles pour certains d'entre eux : affichage, presse, télévision, radio. Les médias se sont multipliés, et en créant de nouveaux supports l'espace publicitaire s'est considérablement élargi. Du "Mass Media" au "Daily me", les marques nous accompagnent désormais quotidiennement dans nos vies.

Une agence possède jusqu'à 3 rôles fondamentaux :
- Le conseil client : l'agence prend par la main le client et le conseille dans ses choix stratégiques marketing.
- La création : ce qui motive les créatifs est sous-tendu par la stratégie adopté par le client.
- La production : c'est l'étape même de création d'une "campagne" publicitaire, et si je mets campagne entre guillemets, c'est parce que ce mot doit être redéfini, mais j'y reviens un peu plus loin.
On retrouve les deux premiers rôles dans toutes les agences de publicité, tandis que la production peut être faite en dehors de l'agence, via studio de tournage, équipe d'infographistes, etc.
Certaines plus grosses agences intègrent la production à leurs activités, afin de faciliter les relations avec le conseil client.

Ce que les nouveaux médias apportent, c'est l'immédiateté de l'impact de la stratégie marketing, avec moultes mesures statistiques en temps réel. Il ne suffit plus d'attendre si une campagne publicitaire télévisée a un impact sur les ventes, en mettant à disposition la vidéo sur Internet on peut observer la vitesse à laquelle elle se propage.

Mais le plus intéressant réside surtout dans la création de programmes et de sites Internet par les marques à des fins utiles pour le consommateur. Le site Internet n'est plus une simple vitrine dans laquelle la marque expose ses produits, mais c'est un outil puissant de communication qui peut prendre la forme d'un magazine avec, par exemple, pour une entreprise œuvrant dans le domaine de l'agroalimentaire, des conseils de nutrition, des recettes, etc. Cette vidéo-conférence (en anglais, vu sur le blogue de Normand Miron), montre très bien les effets qu'ont eu les nouvelles technologies sur le fonctionnement des agences de publicité.



Les conséquences sont multiples pour les agences, car le "feedback" est immédiat et la triple relation "conseil client", "création" et "production" n'est plus linéaire mais éclatée, ce que nous dit d'ailleurs cet article publié par Infopresse aujourd'hui. Cette relation est d'autant plus primordiale lorsqu'on y ajoute le facteur "réseaux sociaux" où le produit mis sur le marché est pris en main par les consommateurs qui se relaient l'information de maintes façons. Il suffit de taper "ipad" sur Youtube pour voir tous ces clients ouvrir l'emballage et donner leurs premières impressions (et certains vont jusqu'à se demander "Will it blend?").



La notion de temps a été modifié par les nouveaux supports de communication, en permettant à la fois de construire une relation sur le long terme et sur le court terme.
Un site Internet de marque sous forme de magazine, un blogue, une application pour téléphone intelligent sont autant de moyens d'accompagner le consommateur dans une relation à long-terme.
Une vidéo qui circule sur Internet, des promotions en ligne, des lancements de produits sont de l'ordre du court terme.

C'est pourquoi il est de plus en plus difficile de parler de "campagne publicitaire", celle-ci étant, par définition, balisée dans le temps et basée sur le schéma linéaire d'un récit. Elle désigne maintenant une façon de faire parmi d'autres. Une campagne "traditionnelle", c'est-à-dire utilisant des médias dits "traditionnels", entre en interaction avec les autres supports qui peuvent être créés sur les réseaux, permettant ainsi une assise primordiale pour la marque dans l'esprit du consommateur. L'identité de la marque peut être rapidement diluée si elle perd le contrôle de son image, et c'est le rôle des agences que de garder une cohérence dans les différents visages d'une marque.

C'est pourquoi les modèles d'affaires qui auront le plus de succès sauront jouer avec ces différentes composantes, en intégrant l'échange constant entre les trois pôles que sont le conseil client, la création et la production, que cette dernière fasse partie intégrante ou non de l'agence. Ces modèles sont dictés d'une part par les technologies, et d'autre part par le consommateur qui reste le seul à pouvoir donner la valeur la plus prisée des marques, celle de l'opinion.

dimanche 25 avril 2010

Télévision : Quel mariage avec Internet?

Dans ce billet de Mediatribe, on constate que le phénomène de convergence des médias continue son ascension. Des partenariats ont été créés en France entre Samsung et TF1 notamment, pour diffuser du contenu provenant du Web directement sur le téléviseur. On pourra ainsi visionner Youtube sans passer par son ordinateur et accéder à des contenus interactifs. Mais où le bât blesse, c'est justement dans le manque d'interactivité. On sait ce que la télévision peut apporter à Internet, mais que peut Internet pour la télévision?

Les succès de plate-forme comme Youtube et Dailymotion ont obligé les chaînes de télévision à se remettre en question. Devenue des concurrentes directes, les chaînes n'ont pas tardé à proposer leurs propres plates-formes, malgré une certaine réticence, car la reprise des émissions sur le Web est un frein pour la rediffusion, qui permet toujours de combler à moindre coût les trous dans la programmation télévisuelle.

Le transfert de contenu de la télévision à Internet a été fulgurant, et les plates-formes de diffusion Web fournissent de plus en plus de contenu indépendamment du petit écran. La preuve en est avec la Web-série "En audition avec Simon" diffusé uniquement sur Tou.tv, mais largement aidée par une forte campagne promotionnelle de Radio-Canada. Ça lui a permis de se placer second dans le nombre de consultations, derrière une populaire série québécoise d'abord diffusée sur le petit écran.

Internet transforme en profondeur nos habitudes de consommation de la télévision. Le principe de la programmation horizontale télévisuelle (des rendez-vous à des heures fixes quotidiennes, hebdomadaires ou mensuels) se retrouve sous une forme parcellaire sur Internet. Le flux peut être subdivisé par autant de canaux disponibles. La diffusion d'un contenu audiovisuel n'oblige pas l'internaute à se retrouver devant son écran d'ordinateur à une heure fixe pour voir une émission, par contre on peut le faire patienter jusqu'à ce que le diffuseur décide de le rendre accessible. Ensuite ce diffuseur doit jouer le jeu du principe fondamentale d'Internet en laissant le contenu disponible un minimum de temps.

La réflexion sur la transmission du message en sens inverse est moins évidente. Même en donnant à la télévision un accès à Internet, comment le téléspectateur peut-il en profiter pleinement, sans clavier ni souris, avec une simple télécommande? 
Deux solutions : ou bien on intègre ces deux éléments à la télévision, auquel cas cela reviendra à naviguer sur le Web avec son téléviseur ; ou alors on propose directement des rubriques (comportant des mots-clés) par des plates-formes pré-sélectionnées et sélectionnable avec une télécommande intelligente. En proposant des widgets sur l'écran, tout l'enjeu est d'arriver à recréer l'expérience Web vidéo en la rendant plus agréable et facilement accessible sur un téléviseur. Les plates-formes Web devront alors s'ajuster pour fournir la qualité requise pour diffusion sur un écran HD (ce que commence déjà à faire Youtube qui propose plusieurs formats de diffusion du plus simple jusqu'à Haute Définition).

Le Web sémantique traversera-t-il la frontière vers la télévision? La recherche par mots-clés ne sera transférable sur un téléviseur si et seulement si le téléspectateur accepte de changer son usage de la télévision, et ce transfert, s'il a lieu, prendra certainement du temps. Cependant on n'avait pas prévu, au moment de l'explosion des téléphones mobiles, du succès de la messagerie texte, avant même l'apparition des téléphones intelligents. Peut-être alors que la plus simple des applications développée dans ce genre de partenariat entre Samsung et TF1 sera l'ouverture à de nouvelles formes d'usages de la télévision.

vendredi 23 avril 2010

Publicité : Bud Light veut faire boire le Québec

C'est Infopresse qui rapporte cette nouvelle : L'une des bières les plus vendues au monde, Bud Light, appartenant au géant Labatt, veut développer son image au Québec. Et il faut croire qu'elle a bien choisit son agence, Publicis, dont la réputation n'est plus à faire. Cette dernière travaille déjà avec les bières Keith's, Igloo et Labatt Blue, appartenant toutes au même brasseur.

Pourtant, si la marque semble bien se porter, elle a de sérieux concurrents tant au niveau canadien, avec les frères Molson, dont l'opération de l'année 2009 aura été de racheter des parts de l'équipe de hockey des canadiens de Montréal, mais aussi avec les bières de microbrasseries de plus en plus prisées, tel Boréal, qui depuis 2008 se met à faire de la publicité à la télévision, preuve d'une ascension fulgurante.



Pour ceux qui ne serait pas familiés avec ce genre de publicité, celle-ci faisait référence à une annonce pour Bud Light, où justement l'étiquette changeait de couleur lorsqu'elle était bien froide.
On remarque d'ailleurs qu'elle tranche avec la plupart des publicités pour la bière par son extrême simplicité et l'utilisation d'un personnage féminin pour la présenter.

La bière est un produit un peu à part dans le monde de la publicité. Sa cible : L'homme dans des environnements où il doit se sentir toujours le plus à l'aise, soit un bar, chez lui, ou bien encore sur un toit avec une bande d'amis.



Molson a lancé le concept "bière de Serge" en 2007, et grâce aux parts qu'elle possède dans l'équipe des canadiens de Montréal, elle a pu facilement associer son produit avec le sport préféré des canadiens, avec toute cette connotation autour de la notion de plaisir.

Certaines marques, selon leurs provenances, vont jusqu'à intégrer l'image de la femme dans leurs spots avec cette touche de glamour, toujours pour le plus grand bonheur du consommateur hétéro-sexuel.



J'avoue beaucoup apprécier cette publicité, malgré l'élément comparateur légèrement sexiste utilisé pour vanter l'élégance et le raffinement d'une mousse...

Bud Light, quant à elle, mise tout dans le marketing de son produit, car on sait que ce genre de bière n'est ni la plus subtile ni la plus goûteuse. Elle fait donc des apparitions pendant le sacro-saint superbowl, pour lequel les grandes marques rivalisent de génie afin de se tailler une méchante part publicitaire.
Bud Light choisit donc de faire dans l'humour, en pratiquant l'autodérision masculine en s'asseyant littéralement sur l'image de la femme comme faire-valoir de la marque.



Et le concept fonctionne! Dans cette création plus récente, la bière change complètement de milieu en s'insérant dans des bureaux où, pour recevoir une Bud Light, le personnel doit faire un don un peu particulier.




On s'attend donc à ce que Publicis prenne le pas sur l'image que Bud Light s'est donné au fil des années, surtout après que le brasseur ait annoncé la fermeture, à partir du 30 avril, de sa brasserie Lakeport, à Hamilton en Ontario, faisant ainsi perdre leurs emplois à 143 personnes dont plus des 2/3 étaient déjà à temps partiel. Si la nouvelle n'a pas tant fait de vagues, espérons pour Labatt que la réelle fermeture de son usine ne dépasse pas les frontières territoriales, linguistiques et culturelles de l'Ontario pour aller se répandre au Québec, auquel cas on sera attentif à la manière dont Publicis saura gérer cette hypothétique crise.

vendredi 16 avril 2010

Médias : Une question de mots

Le CRTC (Conseil de Radiodiffusion et des Télécommunications Canadiennes), organisme public indépendant, s'est prononcé sur les investissements étrangers dans le secteur des télécommunications, en soumettant l'avis qu'une compagnie étrangère ne doit pas posséder plus de 49% de parts d'une compagnie canadienne. Elle propose de nouvelles définitions de ces industries, à l'heure de la multiplication et de l'expansion des différents supports de consommation de produits médiatiques, autrement dit la convergence.

Refuser plus de 49% de capitaux étrangers dans une entreprise de télécommunications canadienne nous laisserait croire à une forme de protectionnisme, en suggérant en même temps une protection de l'industrie culturelle qui fournit ces compagnies de télécommunications : un contenant canadien = un contenu canadien. Cependant on sait que l'équation est fausse car il suffit d'allumer sa télévision pour être submergé de produits médiatiques provenant de l'étranger (principalement des États-Unis) sur des chaînes canadiennes.

Une dépêche de l'agence QMI reprise par le site canoë nous dit que cette décision a été prise par le CRTC car le gouvernement avait accordé une licence à Globalive, contrôlé par l'égyptienne Orascom, alors même que le CRTC l'avait refusé. Pour résumer on passe du refus total à "ok pour 49% d'investissements étrangers" : un net recul du CRTC face au gouvernement.

La deuxième question porte sur la redéfinition des industries de télécommunications : les lois canadiennes les régissant faisait la distinction entre "radiodiffusion" et "télécommunication", autrement dit, nous dit le CRTC, entre "le contenu et la distribution". Il me semble pourtant que la "radiodiffusion" et la "télécommunication" sont plutôt deux formes de distributions de contenus. Au moment de ces définitions, on voulait sûrement distinguer la radio du téléphone, à peu près dans les années 1930? Il était temps que le CRTC les revoit.

Car cette question d'investissements étrangers et de redéfinition peut avoir de lourdes conséquences sur toute l'industrie culturelle canadienne, qu'elle soit francophone ou anglophone. Si une compagnie étrangère possède 49% d'une compagnie canadienne, n'aurait-elle pas un poids certain, dans un conseil d'administration, pour imposer un contenu provenant de son pays? L'idéal pour une entreprise de contenant (le média) n'est-il pas de vendre son propre contenu (ses propres productions médiatiques) déjà produit, emballé et prêt à être diffusé?

C'est cette distinction maladroite entre contenu et distribution qui doit rester la seule valide et c'est pourtant celle-là que le CRTC veut laisser tomber. Le contenu n'est plus disponible que sur un seul canal, mais sur de nombreux autres. L'exemple de tou.tv, sans parler des nombreuses chaînes qui diffusent sur Internet gratuitement, en est l'exemple le plus flagrant et sa popularité n'est que la preuve de l'évolution des médias. Les expériences de lecture, télévisuelle ou radiophonique ne sont plus l'exclusivité des seuls imprimés, radios et télévisions. L'imprimé se lit aussi sur l'ipad ou le kindle, la radio s'écoute en baladodiffusion et la télévision sur le Web. Ce qui change c'est le média d'une part, la manière de consommer d'autre part, mais pas le contenu.

C'est sur ce point précis que la distinction doit être faite entre contenu et contenant pour empêcher une entreprise de télécommunications, qu'elle ait des capitaux étrangers ou non, de fournir sans limite du contenu étranger. Et si le CRTC ne fait pas ce travail, ce n'est pas Ottawa qui va le faire pour lui. Le gouvernement fédéral a d'ailleurs autorisé cette semaine le plus grand libraire en ligne, Amazon, à ouvrir un entrepôt au Canada. Certes elle a l'obligation d'injecter 1.5 millions de dollars dans la culture canadienne, de faire la promotion d'auteurs canadiens et de s'associer à des événements culturels mais elle ne va sûrement pas faire fi de son imposant catalogue de littérature étrangère. C'est donc peu cher payé, 1.5 millions de dollars, pour faciliter la vente d'un catalogue en provenance des États-Unis déjà très présent chez de nombreux libraires.

On croyait le débat entre contenu et contenant enterré par l'explosion des nouveaux médias. Hors il est plus que jamais d'actualité lorsque les organismes et instances politiques ne savent pas les distinguer. "Libéraliser" une industrie comme celle des télécommunications n'est pas seulement faciliter les échanges commerciaux, c'est surtout définir les cadres de ces échanges et ce qui peut ou ne peut pas être échangé dans ces cadres.

mardi 13 avril 2010

Internet : Quand Twitter nous prend pour des twits

Le célèbre site de Microblogging Twitter a annoncé mardi 13 avril l'arrivée de la publicité sur son site. Elle va permettre à des compagnies d'envoyer des "gazouillis" de 140 caractères, à la manière d'un résultat de recherche Google. Ainsi, une recherche sur Twitter d'un mot-clef générera un Tweet en relation avec ce mot-clef. Une publicité non déguisée est-elle une publicité efficace?

Que se passe-t-il quand le réseau social qui fait trembler facebook annonce officiellement l'arrivée de la publicité sur son site? Sûrement la déception pour les idéalistes d'un Internet complètement gratuit. Seulement, nous dit le site Argent, les deux gros joueurs que sont Google et Microsoft y ont déjà mis leurs grains de sable, en versant des sommes d'argent à Twitter pour avoir accès à des tweets dans leurs moteurs de recherche.

Autant dire alors qu'une certaine forme de publicité existait déjà sur Twitter par l'intermédiaire de ces moteurs. L'information se paie, et en payant Twitter, Google et Microsoft ont compris qu'en matière d'informations, leur gagne-pain quotidien, ils ne pouvaient se passer de ces tweets qu'utilisent de nombreux journalistes, personnalités publiques, et même des compagnies, pour exprimer un point de vue ou partager un contenu. C'est que Twitter sait vendre ses informations.

Mais si les compagnies ont une voix sur Twitter, alors c'est de la publicité? Et bien oui et non, et c'est sa plus grande force, parce que lorsqu'elle est démasquée, la publicité peut être mal vu, si elle avance cachée. Les compagnies ne sont peut-être pas sur Twitter, mais les opinions y sont. Et comme chaque réseau social, ce sont les opinions qui véhiculent les idées et qui nous aident à forger nos jugements en fonction de nos attitudes vis-à-vis d'une marque. Si les compagnies n'étaient pas présentes sur Twitter, elles l'étaient en réalité par la bouche de leurs clients, qui, eux, bloguent, twittent et facebookent à longueur de journée.

Car quoi de mieux qu'un bon bouche-à-oreille pour valoriser un produit et faire connaître une marque, à condition évidemment que le produit ait l'appui du public... et l'appui de leaders d'idées sur le Web.

Ce que fait réellement Twitter en annonçant l'arrivée de la publicité sur son site, c'est faire trembler les autres, parce qu'elle va prendre des parts de publicité, notamment à son concurrent direct, Facebook . C'est rendre Twitter officiellement dans la cour des grands, et c'est surtout un moyen de faire comprendre (aux agences qui n'auraient encore rien compris), que Twitter est désormais et plus que jamais incontournable dans une campagne de publicité en ligne.

Les "followers" n'ont qu'à suivre les "followings", ceux qui font et défont les succès des mises en marché de produits. À ce propos d'ailleurs, et je n'avance pas masqué, je suis aussi sur Twitter : @olivier_dilain, à suivre...

jeudi 8 avril 2010

Publicité : Après Tiger, la parole à Nike


Stratégies nous révèle que Nike vient de confectionner une publicité mettant en vedette l'homme le plus célèbre atteint de satyriasis, Tiger Woods. Une vidéo sur Youtube a été visionné plus de 17000 fois moins de 24 heures avant sa parution. Un beau coup publicitaire pour la seule marque qui n'a pas abandonné son champion après ses nombreux scandales sexuels.

La publicité est simple : Tiger, en noir et blanc, comme ses vêtements, avec la célèbre virgule sur la casquette et le tee-shirt. La voix d'outre-tombe en off est celle de son père décédé : « Je veux savoir quelle était ta façon de penser, je veux savoir quels sont tes sentiments, et si tu as appris quelque chose ». Un coup de publicité qui coïncide avec le jour du retour du tigre sur la scène mondiale du golf.



En faisant ça, Nike se donne une formidable image de rédemption. La marque a suivi son athlète dans sa perte d'image de "l'american dream", du "tout le monde peut réussir", surtout pour les minorités visibles, bref au moins une dizaine d'années d'image ultra propre à l'image du golf mis à mal en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. De cette manière, Nike s'excuse aussi de l'avoir suivi.

La marque est-elle allé trop loin en utilisant la voix de son père décédé? C'est de mon avis plus indécent de faire ça que de tromper sa femme 15 fois et d'en faire une orgie médiatique. Mais en restant avec lui, la marque doit aller jusqu'au bout en justifiant ainsi son engagement. Reste à parier que la marque, en faisant cela, aide son poulain en lavant son image, et qu'ainsi Tiger Woods pourra récupérer ses commanditaires, en négociant de meilleurs tarifs grâce à toute cette excitation médiatique qui aura fait parler de lui.

mercredi 7 avril 2010

Internet : Le ipad, une machine à écrire


Au cas où vous ne l'auriez pas remarqué, il paraît qu'Apple vient de sortir un appareil qui va selon de nombreuses personnes, révolutionner nos usages d'Internet. Tout le monde en parle et les théories de la communication sont appelées au secours pour expliquer cette révolution, si révolution il y a. Il faut dire qu'Apple frappe fort, encore une fois, pour nous vendre un produit qui comblera (ou créera) un autre besoin. Que dire alors de ce qu'on en dit, quand la voix d'Apple est reléguée par des milliers de voix qui achètent, utilisent et jugent leurs produits.

C'est ce qu'on appelle une niche, et Apple sait trouver les niches. Un pont entre l'iphone, et l'ordinateur portable. Les auteurs de l'excellent urban dictionary ont même fait ce magnifique néologisme tel qu'ils savent le faire. "ipad nano : A smaller version of the new Apple iPad. Formerly known as iPod Touch" OU comment utiliser un produit déjà existant et le transformer en un nouveau produit qui va changer votre vie.

Mais il faut que je l'avoue tout de suite, je suis PC. Par contre je crois qu'Apple a déjà tout compris depuis longtemps. Un de leur mauvais slogan publicitaire aurait pu être : "L'informatique, c'est compliqué, mais avec Apple, tout devient plus simple". En effet, l'excès de choix, comme le dit très bien Marie-Claude Ducas dans son blogue, ne produit plus une surconsommation mais un état de perplexité qui nous pousserait vers d'autres marques proposant moins de produits. Apple propose des produits simples avec des logiciels très user-friendly, prêts à l'emploi.

Martin Lessard explique que l'ipad va créer des habitudes de lecture. En effet, Apple veut vendre son contenu numérique sur l'ipad, tout comme elle l'a fait (avec réussite) avec itunes. On crie déjà depuis un moment à la disparition de la presse, parce qu'Internet le remplace. Si l'ipad remporte le succès escompté, on pourra bientôt lire sur les unes des journaux : "L'ipad enterre le papier". Je reste pourtant convaincu que la presse a un avenir, si elle veut bien se donner la peine d'y réfléchir, et elle survivra peut-être en collaborant avec les géants d'Internet. L'histoire des médias a déjà montré que l'apparition d'un nouveau média n'en remplaçait pas un autre, mais l'amenait à se remettre en question et à expérimenter de nouvelles formes de communications.

Nathalie Collard, dans La presse du mercredi 7 avril 2010, rapporte d'ailleurs que le Time, le USA Today, le Wall Street Journal et le National Geographic ont déjà lancé une application sur l'ipad. Cependant son article est plutôt une critique acerbe : le ipad serait anti-web? Les applications semblent en effet "fermées" et "limitent beaucoup l'interaction". Évidemment c'est un point de vue de spécialiste, mais pour quelqu'un de novice, c'est synonyme de simplicité. Pourquoi l'interactivité lorsque l'usage est la simple lecture? L'iphone est fait pour ça non? Simplicité, donc. La preuve? Les applications sont conçus UNIQUEMENT pour le ipad.

On voit poindre dans ce débat les habitudes de lecture. Le livre numérique va-t-il survivre grâce à l'ipad? Quels contenus vont proposer les journaux, en plus de leur imprimé et de leur site Internet? Un indicateur simple qui pourrait être fatale à l'ipad, son poids, nous dit encore une fois Nathalie Collard : de 680 grammes, bien plus léger qu'un ordinateur mais plus lourd qu'un livre de 400 pages d'environ 430 grammes. La différence est encore plus grande si on le compare à un journal ou un magazine.

L'usage sera le seul vrai résultat de la réussite d'Apple dans son nouveau produit. Grâce à ses deuxième et troisième générations, la Pomme sera capable de s'ajuster et d'améliorer son appareil à un prix supérieur à ce que la concurrence va offrir sur le marché. Ça n'empêchera pas les "applemaniac" de continuer à acheter leurs produits, car dans une société "à choix multiple" où on est convaincu de son choix, il est toujours moins angoissant de le conserver.

vendredi 2 avril 2010

Internet : la mort subite du nourrisson quebec89



Le 1er octobre 2009 BRANCHEZ-VOUS! et rue89 annonçaient l'ouverture de quebec89. Le 31 mars dernier, après seulement 6 mois d'activités, quebec89 ferme ses portes. Promesses non tenues ou problème d'adaptation culturelle? Chronique d'une mort annoncée.

Avec quebec89, ses créateurs ne s'attendaient peut-être pas à ce que les attentes soient aussi élevées. L'ombre de rue89 a toujours planée derrière lui, et sa réputation a été rapidement faite lors de sa création en 2007, grâce à des journalistes repêchés de Libération et de bons scoops.

Rue89 a d'emblée surfé sur la vague des réseaux sociaux, s'annonçant comme un "projet journalistique indépendant" et "une manière d'informer qui repose sur la coproduction de contenus entre des journalistes, des experts, des passionnés, des témoins, des blogueurs et tous les visiteurs du site."
Pourtant si rue89 s'annonce comme un vrai site d'information ouvert, tout le monde ne peut publier un article. Une équipe de rédaction chevronnée fait sa sélection de blogues, de messages, d'articles pertinents et on retrouve finalement dans leurs manières de travailler l'essence même d'un quotidien imprimé dans la sélection d'information. Certes les points de vue sont multiples et originaux, mais n'est pas auteur qui veut.

De nombreuses différences expliquent en partie l'échec de quebec89. Le ton pas assez incisif, se qualifiant de "site d'information participatif". Où est l'indépendance journalistique adoptée par rue89? Le site incite aux commentaires, aux articles des internautes, mais promet seulement "au moins un article par jour", ainsi que des articles de rue89 pouvant intéresser les lecteurs québécois. Pourquoi aller chercher des articles de rue89 sur quebec89 si ce dernier n'offre pas plus de contenus?

Même si quebec89 avait pour ambition d'être un lieu de débat, avait-il sa place dans le marché de l'information québécoise déjà saturé par les cyberpresse, devoir et autre radio-canada, et envahi par le marché de l'information française?

Le vrai problème est que quebec89 est arrivé trop tard dans la vague du Web social. Aujourd'hui tous les grands titres et toutes les chaînes généralistes et spécialisées informatives proposent aux internautes de poster des commentaires, d'envoyer des liens vers de l'information pertinente, d'ouvrir le débat. Quels sont les journalistes qui n'ont pas encore leurs blogues, ou un compte facebook, twitter ou autre et qui mettent 10 fois par jour leurs profils à jour? Appuyé par ce qu'on appelle encore les "médias traditionnels" que sont la télévision, la radio et la presse, ces sites étaient la plus grosse concurrence de quebec89.

Quebec89 est un cas d'école. Il pose la question de l'adaptation d'un site Internet d'un cadre social et culturel donné à un autre et le débat reste ouvert sur la provenance, la validité et surtout la pertinence de l'information. L'information reste un produit que les journalistes façonnent à la couleur de la marque et cette couleur est fondamentale dans nos choix en matière de consommation d'informations.